Tour de France des nouveaux théâtres 2/2

Tour de France des nouveaux théâtres 2/2
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Après une enquête menée sur les théâtres en difficulté dans l’Hexagone, Profession Spectacle souhaite aujourd’hui rendre hommage à la créativité : rénovations, réouvertures, constructions, réaménagements… Voici la seconde partie de notre enquête sur ces théâtres en plein essor, de l’Île-de-France à la Provence, en passant par l’Auvergne.

Lire la première partie de notre vaste tour de France des nouveaux théâtres.

Sénart (Île-de-France) : un nouveau théâtre scène nationale

Faisons fi du mauvais augure. « Nous préférons retenir la date de l’ouverture du théâtre le 6 novembre 2015 », explique son directeur Jean-Michel Puiffe. Il faut dire que l’inauguration en grande pompe, en présence de Fleur Pellerin, alors ministre de la culture, eut lieu quelques heures avant les terribles attentats du Bataclan et du Stade de France. « On ne peut pas imaginer quelle émotion procure l’entrée du premier spectateur dans le théâtre », raconte Jean-Michel Puiffe. Quand on lui demande comment ce projet a pu voir le jour, compte-tenu du contexte économique, il répond qu’il s’agit d’un miracle qui a duré 8 ans. « C’est tellement rare dans ce contexte où l’on est sans cesse sur d’autres priorités ! La décision de l’édification du théâtre a été prise contre toute raison ; il fallait un bâtiment où se réunir, un lieu qui soit un endroit d’altérité, où l’on brasse de la pensée. » Jean-Michel Puiffe nous raconte comment est né ce projet. « Sénart est une de ces villes nouvelles éloignées de Paris. Ses 250 000 habitants ne devaient pas être condamnés à se rendre à Paris pour assister à un spectacle. En tant que ville nouvelle, Sénart bénéficie des Opérations d’Intérêt National. Le grand stade ayant été construit à Saint-Denis, Sénart n’avait pas bénéficié des aides de l’État ; c’était donc notre tour. »

Théâtre Sénart (© 11h45)

Théâtre Sénart (© 11h45)

Quant au lieu, il correspond à quelque chose d’identitaire pour les gens d’ici. « Seulement 2% du public est parisien, poursuit-il. Nous agissons comme une scène de province, ce qui nous permet une programmation très éclectique. Il faut que tout le monde puisse venir. » Le bâtiment se veut à taille humaine… « Il est assez beau et inattendu, insiste Jean-Michel Puiffe, il se confond avec le ciel. Nous en sommes assez fiers et heureux. Les vieux abonnés craignaient notamment que ce nouveau bâtiment mette fin à la convivialité. Ce n’est pas le cas. Il est très lumineux, avec beaucoup d’endroits cosy. Nous n’avons perdu aucun public mais en avons au contraire gagné. C’est un cercle vertueux. Plus les gens viennent au théâtre, plus ça fabrique de public. Le vrai problème est de décoller les gens de la télévision. La première année s’est bien passée et la seconde a débuté sous les mêmes auspices. Dans le contrat d’objectifs et de moyens qui nous lie, en tant que scène nationale, nous avions fixé comme objectif d’atteindre 50 % de public en plus au bout de 3 ans, soit de passer de 30 000 à 45 000. À la fin de la première saison, nous sommes arrivés à 42 000 places payantes pour le spectacle vivant, ce qui est au-delà des objectifs de la première année. »

Théâtre Sénart (© 11h45)

Théâtre Sénart (© 11h45)

Pour 42 millions d’euros, le bâtiment peut effectivement être beau. La directrice de la communication, Marie-Christine London, estime que « pour un nouveau théâtre, on ne peut pas dire que ce soit coûteux. Ce budget correspond à 6 km d’autoroute, et si l’on compare à la Philharmonie de Paris : le budget a atteint près de 350 millions d’euros ! » Jean-Michel Puiffe enfonce le clou, lui qui compare l’architecture du théâtre de Sénart à celle de la Philharmonie de Paris : « 42 millions d’euros est le coût du deuxième dépassement de la Philharmonie. Le prix d’un lycée. Bien sûr, certains auraient préféré que l’on construise une piscine, autre chose encore, c’est la règle démocratique. » Ce sont les élus, Jean-Jacques Fournier, René Réthoré et Michel Bisson en tête, qui ont porté ce projet pour le faire accepter par le département, la région, puis l’État. Et Jean-Michel Puiffe de conclure : « À Clermont-Ferrand va ouvrir un grand théâtre, et un centre d’art dramatique à Saint-Étienne. C’est heureux et rassurant. On a tendance à parler de la frilosité, alors qu’il se passe beaucoup de choses bien. À nous de faire que les projets rencontrent le public. »

Que le miracle dure, c’est ce qu’il faut souhaiter à la scène nationale de Sénart qui a appris au printemps dernier une baisse de subventions, de l’ordre de 150 000 euros, de la part du Conseil départemental de Seine-et-Marne.

Clermont-Ferrand : le Lieu Identitaire de la Scène Nationale sera inauguré en septembre 2019         

« Destiné à devenir le siège et l’instrument de travail de La Comédie de Clermont-Ferrand », comme le précise le dossier de présentation mis en ligne sur le site internet de la mairie de Clermont-Ferrand, ce bâtiment, dont la conception a été attribuée à l’architecte Eduardo Souto de Moura, comprendra deux salles de spectacle, une grande salle de 900 places et une salle de 350 places ; l’édifice accueillera par ailleurs des bureaux, des loges, un pôle de médiation culturelle et une brasserie. Il est également prévu que la coupole soit un lieu d’exposition. Le projet est estimé à 31 millions d’euros hors taxes, dont 8 millions financés par Clermont Communauté, 6 millions par l’État, 4 millions par le conseil régional, 4 millions par le conseil départemental du Puy-de-Dôme et 9 millions par la ville de Clermont-Ferrand.

Projet initié par Serge Godard en 1997, c’est sous la mandature d’Olivier Bianchi que le conseil municipal de la ville de Clermont-Ferrand a voté la construction du lieu identitaire. Il faut noter qu’en 2013, déjà, après sept années de fermeture pour travaux de grande envergure, l’Opéra-Théâtre de Clermont-Ferrand avait été rouvert. En mars 2016, Audrey Azoulay, tout juste nommée ministre de la culture, s’était rendue pour son premier déplacement officiel, à Clermont-Ferrand, apportant son soutien à la candidature de Clermont au titre de capitale européenne de la culture en 2028.

Saint-Étienne : les travaux de la Comédie seront achevés en 2017

Saint-Étienne, façade ouest (© Studio Milou architecture)

Saint-Étienne, façade ouest (© Studio Milou architecture)

La Comédie de Saint-Étienne est à ce jour le seul Centre Dramatique National à bénéficier d’une rénovation complète. Cette opération de création d’une « nouvelle Comédie » est inscrite au Contrat de Projet signé entre l’État et la Région. La Comédie devrait pouvoir s’installer au mois d’avril 2017, l’ouverture publique étant prévue pour le 6 juin. Le coût de cette opération est d’un peu plus de 29 millions d’euros HT, partagés entre la ville de Saint-Étienne (8,3 M), l’État (7,5 M), la région (6,5M), le département (3,9 M) et l’Établissement Public d’Aménagement de Saint-Étienne (3,265 M). L’ancien site de la Comédie sera, lui, requalifié, dans le but d’aider les compagnies stéphanoises émergentes et de permettre leur développement.

Mougins (Alpes-Maritimes) : la Scène 55 sort de terre

Le nouveau bâtiment de 3000 m² sera prêt pour le premier spectacle, le 10 mars 2017. Proposant une programmation pluridisciplinaire originale, la salle de Mougins se veut complémentaire des lieux culturels voisins. Théâtre, danse classique, danse contemporaine, théâtre de marionnettes, musique actuelle, musique classique, conférences, spectacle jeune public et projections de film y seront proposés.$

Mougins (crédits : Chabanne & Partenaires)

Mougins (crédits : Chabanne & Partenaires)

Géographiquement, la Scène 55 se place au croisement des axes Cannes-Grasse / Sophia-Antipolis-Antibes-Mandelieu. « Il y avait un manque et une appétence pour la culture », assure Vanessa Charles, directrice des affaires culturelles de la ville de Mougins, qui reconnaît qu’il est très difficile de savoir pour l’instant quel sera le public. « On part de rien. Il y a tout à construire. Il faut satisfaire tous les publics. Nous affinerons la programmation petit à petit. »

Le projet, à l’initiative de la ville de Mougins, a été rendu possible grâce au soutien de la région PACA et du Conseil Départemental des Alpes-Maritimes. Le budget total d’investissement s’élève à 12 521 000€ HT, auquel l’État ne participe pas pour l’instant. « Les financements de l’État sont plus contraints », nous a confié Vanessa Charles, ajoutant que l’État donne la priorité aux scènes nationales qui sont au nombre de 72.

Matthieu de GUILLEBON

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