17 janvier 1910 : rendre à Friedrich ce qui n’est pas à Ludwig

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En 1909, un musicologue découvre une symphonie entière en ut majeur qu’il attribue après recherches à Beethoven : elle est créée il y a 112 ans et publiée l’année suivante. Une histoire magnifique, certes, sauf que… elle n’est pas de Beethoven ! Il faudra attendre 1968 pour que la vérité se fasse. Et le nom du vrai compositeur est…

En 1909, Fritz Stein, musicologue allemand, farfouille dans les archives de la société des concerts d’Iéna. Comme pour tous les historiens, la découverte d’un document oublié ou inédit a dû créer un mécanisme physique, un petit éclair d’électricité qui a sans doute parcouru sa colonne vertébrale et transformé ses jambes en coton. Car il découvre dans son farfouillement une symphonie entière, en ut majeur.

Il est vite persuadé que c’est une trouvaille considérable : le style est clairement de la fin du XVIIIe siècle et fait clairement penser à Haydn, sans être de ce dernier. Or, Stein se souvient que, dans sa correspondance, Beethoven indiquait avoir tenté, dans sa jeunesse et avant sa première symphonie, d’écrire une symphonie en ut majeur, inspirée de la symphonie n°97 de Haydn… Et cette partition extraite de la bibliothèque d’Iéna lui ressemble précisément beaucoup…

Il n’en faut pas plus pour que notre explorateur d’archives en déduise qu’il l’a trouvée et qu’il s’agit ni plus ni moins de la « symphonie n°0 » de Beethoven, qui aurait donc composé dix symphonies complètes et non pas neuf, plus les fragments d’une dixième.

Cette symphonie est illico baptisée « Iéna », attribuée à Beethoven, créée voici cent douze ans aujourd’hui, et publiée l’année suivante par Breitkopf et Härtel, éditeur de Haydn et de Beethoven, avec le nom de ce dernier.

Il faut attendre plusieurs décennies (1968) pour qu’un autre musicologue, HC Robbins Landon, fasse une autre découverte dans d’autres archives (celles de l’abbaye de Göttweig) : la copie intégrale de la même partition. Sauf que cette copie porte le nom de l’auteur : Friedrich Witt, et pas du tout Beethoven. Witt, aujourd’hui bien oublié, est un violoncelliste et compositeur estimé, exact contemporain du génie Ludwig, et qui fait surtout carrière comme maître de chapelle à Würzbourg. C’est donc lui l’auteur de cette charmante symphonie, si voisine du style de Haydn, et où l’on admirera en particulier le très dynamique finale. Comme quoi, dans l’histoire de la musique, il y a toujours des surprises et nul doute qu’il nous en attend bien d’autres.

En attendant, rendons à Friedrich ce qui n’appartient décidément pas à Ludwig !

Cédric MANUEL



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Rubrique : « Le saviez-vous ? »



 

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