La Cité du Mot : un monastère restauré qui accueille des artistes étrangers et réfugiés en résidence
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Installée dans le magnifique écrin du prieuré de La Charité-sur-Loire, la Cité du Mot est un lieu patrimonial et de création artistique unique en France, accueillant tous les ans en résidence des artistes étrangers ou en situation d’exil. La 3e édition des “Grands Chemins” aura lieu du 4 au 29 novembre, sur le thème de l’Amérique latine. Présentation.

La Cité du Mot est un lieu culturel qui favorise plus d’une rencontre : celle du patrimoine avec la création artistique et celle des habitants du territoire nivernais avec des artistes venus du monde entier. Véritable fenêtre sur le monde, abri artistique et lieu de partage installé dans le prieuré de La Charité-sur-Loire, petite ville située, comme son nom l’indique, sur les bords de la Loire, la structure accueille tous les ans en résidence des artistes étrangers ou en situation d’exil. Depuis trois ans, elle organise au mois de novembre son rendez-vous pluridisciplinaire “Grands Chemins”.

Rencontre avec son directeur Philippe Le Moine pour une présentation de ce site humaniste et découvrir sa programmation automnale.

« Au commencement était le verbe »

Labellisée “Centre culturel de rencontre” en 2013 par le ministère de la Culture, la Cité du Mot est située au prieuré de La Charité-sur-Loire, à environ une vingtaine de kilomètres de Nevers et à deux heures et demie de Paris en train. Elle compte parmi les vingt-trois Centres culturels de rencontre qui existent en France, un réseau européen créé dans les années soixante-dix, qui a vu par la suite émerger d’autres centres culturels dans le monde entier.

« Toutes ces structures ont pour mission de faire dialoguer le patrimoine et la création contemporaine, explique son directeur, Philippe Le Moine. On peut citer la chartreuse à Villeneuve-lez-Avignon, l’abbaye de Noirlac ou encore la Saline royale d’Arc-et-Senans. Chaque centre culturel possède sa propre thématique : à Noirlac, c’est plutôt la musique, à La Chartreuse, plutôt le spectacle… Nous, c’est le mot, sous toutes ses formes. »

La Cité du Mot est installée dans le monastère de la Charité-sur-Loire, qui fut fondé en 1059 par l’ordre de Cluny et dont l’église Notre-Dame est inscrite au patrimoine mondial de l’Unesco depuis 1998, en tant qu’étape des chemins de Saint-Jacques-de-Compostelle. « Notre mission est de mettre en valeur le site patrimonial en développant des projets culturels contemporains, avec comme fil rouge : le mot. Au commencement était le verbe ; on est donc sur une thématique assez large. »

La genèse du lieu : un site classé « sorti de l’ombre »

Parallèlement à un vaste chantier de restauration, notamment de la salle capitulaire, de la salle Mérimée, de l’ensemble des toitures et du cellier, de nombreux événements culturels se sont déroulés au cœur de cette Cité où seront bientôt aménagés une bibliothèque et un musée.

Nommé directeur de l’établissement en 2018, Philippe Le Moine, globe-trotteur de la culture ayant travaillé dans différents pays, au Gate Théâtre à Londres notamment et comme attaché culturel à l’Institut français de Serbie, revient sur sa création. « Il y a d’une part la ville historique, ses projets patrimoniaux, et d’autre part le festival du mot qui a pris racine ici pendant une dizaine d’années. Avec la présence forte de bouquinistes et son marché du livre ancien, c’était une suite logique qu’un festival autour des mots s’installe à La Charité. Le site est petit à petit, non pas sorti de terre, mais de l’ombre : il a été restauré et tout cet ensemble a permis de créer cette structure permanente qu’on appelle aujourd’hui la Cité du Mot. »

Grands chemins : en route pour l’Amérique latine

Philippe Le Moine (crédits photographiques : Morgane Macé - Profession Spectacle)

Pour sa troisième édition, la Cité du Mot organise le rendez-vous “Grands Chemins” : cinquante manifestations pluridisciplinaires avec concerts, ateliers, repas partagés, cinéma, spectacles, lectures et danse, du 4 au 29 novembre, sur le thème de l’Amérique latine.

« On avait déjà notre temps fort de printemps, le festival “Aux quatre coins du mot”, précise Philippe Le Moine. L’idée était d’en avoir un autre à l’automne, une saison où l’on a tendance à s’enfermer dans l’hiver. On s’est dit que ce serait le bon moment pour s’intéresser à ce qui se passe ailleurs et prendre un rayon de soleil. Cette année, nous partons à l’aventure en Amérique du Sud, du Mexique jusqu’à la Patagonie, en passant par Cuba. »

Cet ensemble de manifestations prend de l’ampleur chaque année et se déroule dans treize villes du département nivernais, réunissant de nombreux partenaires comme le centre social intercommunal la Pépinière, le Centre d’accueil pour demandeurs d’asile de la Charité, le festival des Solidarités, le festival Migrant’Scène, organisé par la Cimade, ou encore Sceni Qua None, nouveau partenaire de Grands Chemins, qui gère le réseau des miniplexes du département.

La Cité du Mot organisera deux concerts à domicile, en ouverture et en clôture de l’événement : « On commence par une soirée autour de Buenos Aires avec César Stroscio au bandonéon le 7 novembre. On clôturera les festivités le 28 à la Charité, avec le carnaval de Rio et la Batucada des nièvrosés qui déambulera dans les rues, pour finir par un concert du trio Vidala, qui fera revivre la Nueva Canción, bande son des luttes sociales d’Amérique Latine. »

Une autre rencontre non fortuite, organisée en partenariat avec le Consulat général de Rio, réunira les six femmes que l’illustratrice et écrivaine activiste Thais Linares a croqué pour son prochain livre.

« Le monde bouge encore un peu, tout le monde n’est pas assigné à résidence »

La Cité du Mot accueille en résidence des artistes étrangers et réfugiés dans le cadre des programmes Odyssée et Nora, financés par le ministère de la Culture. Photographes, illustrateurs ou auteurs, ces artistes bénéficient ici d’un espace pour créer.

« On a par exemple accueilli l’illustratrice brésilienne Thais Linares, qui s’est retrouvée en résidence prolongée pendant la crise sanitaire, puisqu’elle est rentrée au Brésil il y a seulement un mois, confirme le directeur du lieu. D’autres artistes venues d’Argentine, comme Ángeles Cornejo et Sol Cifuente, sont venues l’année dernière pour un travail de roman graphique et reviennent prochainement. Jusqu’à il y a deux semaines, on ne savait pas si elles pourraient venir de Buenos Aires mais c’est finalement possible. Le monde bouge encore un peu, tout le monde n’est pas assigné à résidence. »

Si la Cité du Mot n’est pas un lieu de diffusion ; c’est pendant son festival de printemps “Aux quatre coins du mot” que la structure programme des spectacles de théâtre et de théâtre de rue. « On est capables d’accueillir des compagnies professionnelles au cellier ou en salle haute, mais nos temps de résidence restent principalement adaptés au travail de recherche. On accueille parfois des auteurs de théâtre comme Souleymane Bah qui a reçu le grand prix RFI de théâtre il y a quelques semaines à Limoges. Une grande partie de son texte fut écrit à La Charité. »

Les formats “Scratch”

Philippe Le Moine vient du monde théâtral : il est notamment traducteur des œuvres du dramaturge anglais Dennis Kelly. C’est l’une des raisons pour lesquelles les travaux d’écriture en lien avec le spectacle vivant lui tiennent à cœur. Il a par exemple travaillé en résidence avec la metteure en scène Constance Dollé pour son spectacle Girls and boys, monté il y a deux ans au théâtre du Petit-Saint-Martin.

Ouvert à l’accompagnement des compagnies durant quelques dates par an et autour de thématiques liées aux projets de la Cité du Mot, il explore dans sa programmation des pratiques expérimentées à l’étranger. « On organise quatre ou cinq petits formats scratch pendant “Aux quatre coins du mot”. C’est un programme qu’on faisait quand j’étais à Londres : un “scratch” est un moment où la compagnie de théâtre va partager son projet avec le public et échanger sur celui-ci. Ce n’est pas juste une discussion ! La compagnie dit : “On en est là de notre projet, qu’en pensez-vous ?” Ce n’est pas quelque chose qu’on fait beaucoup en France, mais ça crée un lien avec le public qui aura peut-être envie d’aller voir la forme d’un spectacle auquel il a contribué. »

Lieu patrimonial et de création artistique, la Cité du Mot s’inscrit dans une démarche humaniste et solidaire. Située au cœur d’une ville d’art et d’histoire, sa programmation culturelle bien ancrée sur le territoire est ouverte sur le monde.

Morgane MACÉ
Correspondante Bourgogne-Franche-Comté

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En savoir plus : programmation des Grands Chemins

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Crédits photographiques : Morgane Macé / Profession Spectacle



 

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