Le Festival d’Avignon a lieu quand même

Le Festival d’Avignon a lieu quand même
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Où notre éprouvé chroniqueur imagine un dialogue entre deux bénévoles pèlerins de la culture égarés et lunaires déambulant dans les rues presque désertes du centre historique d’Avignon.

Restez chez vous
.

C’est un succès, vraiment, ce Festival en télétravail.

Oui, il faudra recommencer l’an prochain.

En plus, ça coûte moins cher.

Et la ville est moins dégueulasse.

C’est tout bénèfe.

Il n’y a plus ces affiches immondes, aussi.

Oui, c’était sale, ça.

Les commerçants ne font pas la gueule ?

Y en a plus.

Plus tant que ça non, en effet.

Et puis, ils faisaient déjà la gueule avant, alors…

Les gens d’ici sont plus peinards quand même.

Les gens d’ici pardon mais on n’en a rien à foutre.

Oui, c’est nous l’élite.

Et eux les beaufs. Sauf dans les tiéquars.

Oui c’est là l’avenir de la lutte et de la culture des cultures en lutte.

Tout à fait. L’irrévérence et la révolte.

On va y faire un tour ?

Ils ne sont pas préparés à ça, je pense.

Les dealers sont dans la merde aussi, y paraît.

Les pauvres. Y a un fonds de soutien, non ?

Oh, sans doute. Y a bien un truc pour les intermittents.

Oui, les pauvres, ça ne doit pas se vendre trop, leurs trucs.

Tu m’étonnes. Attends, tu parles bien des dealers, là ?

Non, des intermittents.

Ah, ces artistes.

Les pauvres.

Mais quand même, ce calme dans les rues.

Y a moins de viande saoule la nuit, oui.

C’est coule.

Ce Festival fait l’unanimité. Le télétravail c’est vachement bien.

Il ne se passe enfin vraiment rien.

La culture a décolonialisé Avignon.

Oui, c’est bien, ça. C’est le juste mot.

Du coup, la différence entre In et off s’estompe.

Carrément. C’est à mort plus égalitatoire.

Mais l’argent, quand même ?

L’argent coûte cher.

Mais ça fait quand même un déficit de culture, non ?

De culture ?

Non, ça ne fait pas un déficit de culture ?

Je ne crois pas. Je ne comprends pas bien la question.

C’est le mot déficit que tu ne comprends pas ?

Non.

Pascal ADAM

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Avec un goût prononcé pour le paradoxe, la provocation, voire la mauvaise foi, le dramaturge, metteur en scène et comédien Pascal Adam prend sa plume pour donner un ultime conseil : « Restez chez vous » ! Tel est le titre de sa chronique bimensuelle, tendre et féroce, libre et caustique.



 

 

 

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