Alan Sorano, le choix de la polyvalence
Petit-fils de Daniel Sorano, qui fit partie de la grande génération du Théâtre national populaire de Jean Vilar au festival d’Avignon, Alan Sorano est un comédien de trente ans qui sait aussi bien s’impliquer dans le théâtre d’avant-garde que jouer dans des séries télévisées à succès (Les Mystères de l’amour ou Plus belle la vie). Itinéraire d’un jeune artiste qui a résolument fait le choix de la polyvalence.
Entre Alan Sorano et Avignon, il y a tout d’abord une belle et grande histoire de famille. Né il y a trente dans la cité des papes, le jeune comédien a été bercé par l’ombre tutélaire de son grand-père, Daniel Sorano (1920-1962). Ce dernier fit partie de la grande génération du Théâtre national populaire (TNP) de Jean Vilar au festival d’Avignon et joua notamment aux côtés de Gérard Philipe, Jean-Pierre Darras, Georges Wilson, Philippe Noiret, Michel Galabru, Bernard Blier ou encore Maria Casarès. « J’ai découvert le théâtre très jeune, grâce à ma grand-mère, la chanteuse d’opérette Suzanne Deilhes Sorano. Un jour, elle m’a emmené voir à Toulouse, dans le théâtre qui porte le nom de mon grand-père, le Roméo et Juliette monté par Maurice Sarrasin, son complice de toujours. Ce fut une véritable révélation », se souvient-il. Alan Sorano décide alors de marcher sur les traces de cet aïeul qu’il n’a malheureusement pas connu et que l’on surnommait affectueusement « Sorano de Bergerac » tellement il s’identifiait au héros d’Edmond Rostand. « Je me suis inscrit au Cours Simon, le plus ancien de Paris, car j’en appréciais l’esprit de troupe. Les week-ends, il nous arrivait de réparer les vieux bancs sur lesquels Louis de Funès, Michèle Morgan ou la regrettée Danièle Delorme avaient donné leurs premières répliques. À la fin, nous étions un vrai noyau de sept ou huit comédiens. Notre formation s’est terminée par une représentation au théâtre du gymnase dans une salle immense de 700 places. »
Dans le monde fermé des séries télévisées
À la sortie du Cours Simon, le jeune comédien se lance dans un projet de Théâtre-Forum emmené par Michel Derville, dernièrement à l’affiche du Cercle des illusionnistes, pièce d’Alexis Michalik triplement récompensée aux Molière 2014. Ces spectacles, destinés à sensibiliser les jeunes et les lycéens au théâtre, lui donnent l’occasion de faire ses gammes et de partir en tournée pendant deux ans pour une centaine de représentations partout en France. Puis c’est la rencontre avec Sandrine Fougeyrollas son agent artistique, qui lui propose d’entrer dans le monde très fermé des séries télévisées. « La relation de confiance que j’ai tissée avec Sandrine m’a permis de jouer dans Petits secrets entre voisins, Les Mystères de l’amour et, dernièrement, Plus belle la vie. Au début de sa carrière, il ne faut pas avoir peur d’être polyvalent et de passer du théâtre à la télévision », souligne Alan. Le jeune homme se verrait d’ailleurs bien dans un personnage récurent du petit écran. Mais l’appel du public et du spectacle vivant se fait à nouveau sentir. En 2014, le dramaturge breton Henry Le Bal lui donne un beau rôle de valet de comédie (Tharsis) dans sa pièce intitulée La Péniche sur la vie de Marie-Madeleine. Une pièce qui fut jouée pendant deux mois à Paris, dans la crypte de l’église Saint-Sulpice. « Le théâtre d’Henry Le Bal est très profond et spirituel. Sa grande force est d’être assez souple dans la direction d’acteurs ; j’ai ainsi pu lui faire des propositions avant chaque représentation. »
Dans la lignée des Sorano
Récemment, Alan a entrepris de faire un stage au théâtre de la Tempête, avec Dominique Boissel et Philippe Adrien. « J’ai découvert des gens qui avaient d’autres parcours et qui sortaient du Conservatoire national ou de l’ENSATT de Lyon. Nous travaillons actuellement sur le rêve, un thème cher à Philippe Adrien, qui nous a d’ailleurs demandé à l’issue de nos travaux de lui présenter quelque chose. » Avec le recul permis par ces sept premières années d’expérience, Alan a acquis la conviction qu’il faut, pour réussir à décrocher un rôle, se rendre disponible, être ultra-réactif et surtout se donner à fond au moment du casting. « Dans ce domaine il y a une recette qui marche, c’est d’arriver sur scène en ayant déjà l’aspect du personnage », explique-t-il. L’année prochaine, Alan Sorano reviendra au festival d’Avignon avec la ferme intention de créer un spectacle en hommage à son grand-père : « En 1952, après la première de L’Avare, alors que mon grand-père interprétait le rôle de La Flèche, Jean Vilar s’était approché de lui et lui avait glissé à l’oreille : tu vois Daniel, ce soir tu m’as montré comment on joue Molière. Je cherche simplement à être digne de cet héritage. »
David RAYNAL