La magnifique histoire du Grenier de Toulouse

La magnifique histoire du Grenier de Toulouse
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Depuis 2012, la ville de Tournefeuille, en périphérie de Toulouse, prête au Grenier de Toulouse – quelque 60 soirs par an – son impressionnant théâtre de l’Escale. David Gaborit, chargé des relations presse pour la compagnie, nous reçoit dans la salle de réunion, aux murs recouverts d’affiches de leurs représentations : chacune d’elles raconte l’histoire, depuis 1945, promettant une belle rencontre.

Les coulisses des Trois Mousquetaires deviennent le décor de notre discussion. David Gaborit se réjouit d’une évolution constante du public (+17 % cette année !) et des représentations croissantes pour les scolaires… Ils sont victimes de leur succès !

Stéphane Batlle, directeur artistique et comédien échevelé de la compagnie, arrive alors. Enthousiaste, il n’a que le temps de reprendre ses esprits avant de présenter avec fierté les subtilités techniques des décors. Mais c’est l’histoire de la troupe, véritable plongée dans l’aventure du mécénat culturel, qui retient bientôt notre attention.

Plongée dans l’aventure d’un mécénat atypique

En 2007, après avoir été remercié par différents théâtres, le Grenier de Toulouse recherche son toit. Grâce notamment à une campagne menée avec Sandrine Marrast, directrice d’ArtScenica, la compagnie bénéficie alors du prêt de la salle – techniciens et charges aux frais de la municipalité – et de la totalité des revenus de la billetterie. Ils toquent ensuite à plusieurs portes de chefs d’entreprise en justifiant, au nom de la réputation de la compagnie et de la valeur de la culture, la nécessité de les soutenir financièrement. Devant les refus successifs, Stéphane Batlle, qui, à l’époque, avait repris la direction de la troupe avec Pierre Matras, décide d’amorcer sa pompe. « Au lieu de demander aux chefs d’entreprise de mettre de l’eau dans ma flaque, j’ai creusé mon propre puits ».

À partir de ses compétences de directeur artistique, il propose une formation à la communication et au savoir-être – aujourd’hui le service théâtre et entreprise. Sur un coin de table, dans la cuisine des comédiens, l’artiste met en scène sa « Révélation » : en un mouvement de main, il tourne sa paume mendiante pour une chaleureuse poignée de main, témoin d’un partenariat. « L’avantage pour eux ? Avec la loi de finances Aillagon de 2003, ils sont défiscalisés de ce qu’ils facturent ». Il se fraie ainsi une entrée auprès d’autres chefs d’entreprises : « Là, ils m’ont dit : que pouvons-nous faire pour vous ? ».

Entre don et dû : une œuvre collective

Ainsi, du particulier qui soutient une pièce qu’il apprécie au gros-œuvre avancé par une entreprise, en passant par le Club des Toqués (repas pour les soirs de première aux quinze comédiens dans cette même cuisine), le Grenier de Toulouse est financé pour 1/3 par le mécénat, 1/3 par sa billetterie et 1/3 par les subventions publiques… qui voient leur intérêt dans l’ampleur que prend le Grenier de Toulouse !

« Je crois qu’il faut qu’on arrête de croire que tout nous est dû… nous devons donner aussi ! » Cet échange de bons procédés nourrit plus de quatre-vingt partenariats – Tournefeuille imposant progressivement une identité culturelle forte, grâce au succès de la compagnie, les entreprises bénéficiant quant à elles d’une défiscalisation ainsi que de formations pour leurs employés.

Fort de cet essor, Stéphane Batlle et sa troupe se lancent dans l’édification de la Maison du Grenier, porté par un bail de prêt de 99 ans, concédé par la ville de Tournefeuille et commencé l’an dernier. Au programme : une salle de création et de répétition, cours de théâtre aux familles des mécènes et aux intéressés… D’autres projets sont actuellement en cours, signe que leur enthousiasme n’a pas encore trouvé de limite.

Des coups de cœur tout en confiance

« C’est une compagnie transgénérationnelle, on travaille vite parce qu’on se donne et qu’on aime ! », confie-t-il, enthousiaste. Avec émotion, Stéphane Batlle évoque Maurice Sarrazin, créateur du Grenier de Toulouse et du théâtre Sorano ; ce pionnier, après avoir formé ses comédiens, leur a transmis la direction artistique. Avec Pierre Matras, ils sont aujourd’hui à la tête d’une troupe composée de huit comédiens permanents. « Mais ça, c’est sur le papier… En réalité nous sommes surtout des amis ».

Leur ligne artistique ? Une succession de coups de cœur, qu’ils partagent les uns aux autres, avant d’entamer une lecture à haute voix. « Si ça sonne, on budgétise et Pierre Matras prend la décision de nous lancer ou pas ». Leur bonne connaissance réciproque leur permet d’assurer 5 ou 6 pièces par saison : « On se connaît bien, on se fait confiance ».

Il est précisément temps pour Stéphane Batlle de « commencer [s]a journée » : à 19 heures, il part rejoindre ses compagnons de jeu pour quatre heures de show. Car pour lui, aucun doute, « il faut savoir se donner ».

Joséphine RABANY

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