L’INA peut exploiter une œuvre audiovisuelle sans autorisation préalable de son auteur

L’INA peut exploiter une œuvre audiovisuelle sans autorisation préalable de son auteur
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La requête de la SPEDIDAM vient d’être rejetée par la Cour de Cassation. L’INA a bien le droit d’exploiter les archives audiovisuelles des sociétés nationales de programme sans avoir besoin de demander l’autorisation écrite de l’artiste-interprète.

L’arrêt de la Cour de cassation du 22 janvier 2020 (n° 17-18.177) marque la fin d’un long parcours judiciaire. Au terme de ce parcours, il se confirme que l’Institut national de l’audiovisuel (INA) peut exploiter les archives audiovisuelles des sociétés nationales de programme sans avoir besoin de demander l’autorisation écrite de l’artiste-interprète.

Rappel des trois arrêts rendus par la Cour de cassation en 2015

L’affaire avait déjà donné lieu à trois arrêts de la Cour de cassation rendus en 2015 (Civ. 1re, 14 octobre 2015, n° 14-19.917, Bull. civ. I, n° 244).

Ces arrêts portaient sur le régime dérogatoire* institué par la loi du 30 septembre 1986 (II de l’article 49) au profit de l’INA, régime qui lui permet d’exploiter des œuvres audiovisuelles sans avoir obtenu au préalable l’accord de leurs auteurs. La Cour de cassation avait censuré une cour d’appel pour avoir jugé que l’INA devait apporter la preuve de l’autorisation par l’artiste-interprète de l’exploitation de sa prestation.

En 2018, la Cour de cassation a tout de même sollicité l’avis de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) sur ce point, lui demandant si ce régime dérogatoire est compatible avec la directive 2001/29/CE sur l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information.

La CJUE lui a répondu le 14 novembre 2019 que cette directive ne s’oppose pas à une législation nationale qui établit, en matière d’exploitation d’archives audiovisuelles par une institution désignée à cette fin (en France, l’INA), une présomption réfragable – c’est-à-dire qui peut être mise en échec par la preuve contraire de l’absence de consentement – d’autorisation de l’artiste-interprète à la fixation et à l’exploitation de sa prestation, lorsque cet artiste-interprète participe à l’enregistrement d’une œuvre audiovisuelle aux fins de sa radiodiffusion.

La présomption de consentement de l’artiste-interprète

S’appuyant sur cet avis confirmant le sens de son arrêt de 2015, la Cour de cassation confirme aujourd’hui l’arrêt d’une cour d’appel qui se fonde sur la présomption de consentement de l’artiste-interprète au bénéfice de l’INA pour juger que l’Institut peut exploiter une œuvre audiovisuelle sans avoir besoin d’obtenir au préalable l’autorisation de son auteur.

La Cour rejette ainsi la requête de la Société de perception et de distribution des droits des artistes-interprètes de la musique et de la danse (SPEDIDAM). Les requérants reprochaient à l’INA, qui était quant à lui soutenu par deux syndicats, le syndicat indépendant des artistes-interprètes (SIA-UNSA) et le syndicat français des artistes-interprètes (CGT), de commercialiser sur son site internet des vidéogrammes et un phonogramme d’un batteur de jazz décédé en 1985.

La cour relève que celui-ci avait participé à la réalisation de ces œuvres aux fins de leur radiodiffusion par des sociétés nationales de programme, qu’il avait connaissance de l’utilisation envisagée de sa prestation et qu’il l’avait effectuée aux fins d’une telle utilisation. Ce faisant, la Cour énonce les conditions qui doivent être remplies pour que l’artiste-interprète puisse être présumé consentir à l’exploitation sa prestation par l’INA.

Cette présomption peut cependant être renversée par la fourniture de la preuve contraire. L’artiste-interprète qui participe à l’enregistrement d’une œuvre audiovisuelle qu’il sait être destinée à la radiodiffusion dispose toujours du droit d’interdire la reproduction de sa prestation ainsi que sa communication et sa mise à disposition du public. Il doit alors manifester expressément (par écrit) son absence de consentement.

Frédéric DIEU

* Ce régime déroge aux dispositions de l’article L. 212-3 du code la propriété intellectuelle imposant l’autorisation écrite de l’artiste-interprète pour la fixation de sa prestation, sa reproduction et sa communication au public.

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2 commentaires

  1. Bonjour Madame,

    Nous avons corrigé cette petite imprécision, au demeurant anecdotique puisque ne changeant strictement rien au fond de l’article. Mais il faut tout de même rendre à César ce qui lui appartient ; l’approximation est désormais rectifiée.

    Cordialement,
    La Rédaction

  2. TRES GROSSE erreur dans l ‘ article de Frédéric Dieu : le SIA et le SFA appuyait la thèse de l INA et non celle de la Spedidam !!!

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