Mathieu Fournet (CNC) : « De nombreux pays du monde suivent ce que font les Français »

Mathieu Fournet (CNC) : « De nombreux pays du monde suivent ce que font les Français »
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Après une carrière à l’étranger et notamment aux États-Unis comme attaché audiovisuel, Mathieu Fournet a pris ses fonctions en tant que directeur des affaires européennes et internationales du CNC le 1er avril dernier. Il revient pour Cineuropa sur un festival de Cannes 2019 bien chargé. 

Entretien.
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Quelles ont été vos priorités pour votre premier festival de Cannes en tant que directeur général aux affaires internationales du CNC ?

Cannes est le lieu où toute la planète du cinéma est présente : c’est le moment idéal pour rencontrer tous nos partenaires en bilatéral et multilatéral. Cette année, nous avons notamment organisé sur le pavillon du CNC les pitchs de la Cinéfondation, une table ronde sur l’aide aux cinémas du monde, des ateliers de coproductions, pour les francophones mais aussi franco-palestiniennes. Le pavillon du CNC a également accueilli le déjeuner des soixante-dix ans d’Unifrance, et les troisièmes rencontres franco-indiennes, l’Inde étant un grand pays de cinéma. Cannes, c’est donc à la fois pour nous des rendez-vous institutionnels et des rencontres professionnelles.

Quel est le premier bilan de l’augmentation du plafond du crédit d’impôt international ?

Cette mesure portée par Frédérique Bredin a été très bénéfique pour l’accueil de tournages étrangers. Pas plus tard que mardi dernier, le président de la MPAA (Motion Picture Association of America), Charles Rivkin, a ouvert une table ronde sur notre pavillon en rappelant la compétitivité du crédit d’impôt international français (C2I) pour les grands studios et les plateformes américains, et en vantant la qualité de nos techniciens et de nos paysages. Le C2I français est compétitif et remplit donc tous ses objectifs : le nombre de tournages internationaux en France est passé de vingt-deux projets en 2015 à cinquante-et-un projets en 2018, soit 274 millions d’euros de dépenses. Même si nous sommes très proactifs vis-à-vis d’autres grands pays, l’Inde notamment, les trois-quarts des productions qui viennent tourner en France sont originaires des États-Unis. Par exemple le prochain Wes Anderson, The French Dispatch, a été tourné entièrement à Angoulême, avec, du côté français, la productrice Octavia Peissel.

Où en est le nouveau fonds de soutien pour les exportateurs mis en place en 2017 ?

Nous travaillons à établir un bilan de ce nouveau dispositif d’aide porté par Frédérique Bredin dans le cadre du plan export 2017. Il a été mis en place de façon expérimentale pour trois ans : nous en donnerons donc un bilan chiffré d’ici à la fin 2019. Nous avons besoin de savoir si ce fonds de soutien a permis à certains vendeurs de se positionner avec des minima garantis plus élevés ou, plus en amont sur les films, si cela a amélioré leur capacité à vendre leurs films à l’étranger, etc. Nous travaillons pour cela main dans la main avec l’ADEF.

Vous avez longtemps vécu aux États-Unis (notamment comme attaché audiovisuel), comment analysez-vous la baisse des entrées des films français à l’export en 2018 et leurs difficultés actuelles aux États-Unis ?

Concernant l’exportation des films français en général, 2018 est effectivement une année sans film locomotive de langue anglaise. Mais les entrées des films en langue française restent stables. Effectivement le marché américain est difficile, notamment dans les salles où la place du film étranger sous-titré est de plus en plus compliquée à défendre, en dehors de la bulle de New York. Le CNC, Unifrance et les services culturels de l’ambassade de France aux États-Unis mettent en place énormément d’offres de programmes clés en main, de tournées d’artistes et de réalisateurs, en s’appuyant sur les liens tissés depuis des années avec les universités américaines et les départements cinéma des grands musées. Le cinéma français reste la première cinématographie étrangère aux États-Unis, représentant entre 0,8 et 1,5 % du box-office américain chaque année. Il faut être créatif dans nos offres, chercher à renouveler les publics, développer les sous-titres en espagnol, car le cinéma français ne peut pas se contenter d’être une référence chic à Manhattan.

Les plates-formes ont, cette année encore, été très présentes à Cannes, pensez-vous qu’elles vont participer davantage au financement de la création française ?

Nous avons beaucoup d’échanges notamment avec l’Allemagne, le Canada et le Québec sur la manière d’intégrer de manière vertueuse les plates-formes dans les systèmes nationaux de financement de la création. Au Québec, par exemple, a été mise en place une taxe de 9,75 % sur les abonnements Netflix au niveau provincial. Et la directive européenne prévoit des quotas de diffusion de 30 % de programmes européens à intégrer dans l’offre des plates-formes. C’est aussi important que leur participation à la création. Le travail des vendeurs internationaux commence à porter ses fruits : ainsi aux États-Unis, des films français d’auteurs ont été mis en avant par Netflix, comme Timbuktu, L’Inconnu du lac, La Vie d’Adèle, ou encore la série 10 % (Call My Agent), qui font de belles audiences. En tous cas, de nombreux pays du monde entier suivent ce que font les Européens, et notamment les Français, face au développement fulgurant des plates-formes.

Propos recueillis par Valérie GANNE / Cineuropa

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Source photographique : Cineuropa



 

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