Bibliothèques musicales : les sources de la pratique

Bibliothèques musicales : les sources de la pratique
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Nous vous l’annoncions au début du mois dernier : la Fondation Royaumont et Profession Spectacle ont conclu un partenariat afin d’accomplir une œuvre de transmission commune auprès des professionnels de la culture. Nous sommes heureux d’ouvrir désormais mensuellement nos colonnes à Thomas Vernet, responsable de la Bibliothèque musicale François Lang et de la Médiathèque Mahler, pour ces « feuillets d’album de Royaumont ».

« Feuillets d’album de Royaumont »

Les héritages culturels, conceptuels, linguistiques sont le fruit des processus d’évolution de la civilisation humaine, au même titre que les ressources naturelles sont le résultat de millions d’années de transformation.

En 1987, le rapport Brundtland qui forgea la notion de développement durable, insistait sur la capacité des générations actuelles à léguer aux générations futures un monde viable et vivable, à leur restituer la plus grande part de ce dont elles ont hérité dans un état a minima équivalent. Les menaces qui pèsent tous les jours plus lourdement sur ce patrimoine écologique comme artistique doivent nous faire prendre conscience de l’urgence à le préserver dans le temps comme dans l’espace, à le faire connaître pour mieux le transmettre et l’enrichir.

Articuler musicologie, interprétation et création

Les bibliothèques musicales ont cela de particulier qu’elles conservent la mémoire d’un art par essence immatériel et qui ne se révèle que grâce à l’interprète. Les partitions, manuscrites comme imprimées, sont donc des objets physiques autant que des « chambres aux échos » insaisissables, mais ô combien réflexifs et bouleversants.

À travers l’acquisition en 2007 d’un fonds musical d’une valeur exceptionnelle – la collection du pianiste François Lang (1908-1944) – la Fondation Royaumont a confirmé son action en faveur de la valorisation du patrimoine en même temps qu’elle a offert aux interprètes, musicologues et compositeurs un accès privilégié à des sources musicales d’une grande richesse et un espace de travail propice à la rencontre entre recherche et pratique artistique. « On conçoit quel enrichissement peut procurer à un interprète la familiarité avec des sources originales, la révélation d’un répertoire oublié, la possibilité de comparer le manuscrit du compositeur avec l’édition qui en a été diffusée ou, d’une manière plus générale, la découverte du geste primitif du créateur », écrit François Lesure dans la préface du catalogue de la collection F. Lang1.

Depuis dix ans, et grâce à son ancrage au cœur de la Fondation Royaumont, la Bibliothèque musicale François Lang (BmFL) a ainsi permis une articulation originale entre musicologie, interprétation et création, entre recherche, formation professionnelle et diffusion.

Les bibliothèques musicales, entre cabinet de curiosité et salon de musique

Considérer le document comme source de la pratique implique de porter un regard critique sur les différentes éditions d’un même texte musical, de les replacer dans leur contexte, d’interroger l’histoire de l’interprétation et de là de remettre en question les notions d’authenticité et de véracité de l’œuvre.

Une bibliothèque telle que la BmFL, qui se situe à mi-chemin entre le cabinet de curiosité et le salon de musique favorise de telles approches.

En 2016, forte de son expérience en matière de valorisation de fonds musicaux, la Fondation Royaumont s’est vue confier le pilotage des activités de la Médiathèque Musicale Mahler (MMM) à Paris, avec laquelle elle partage la même philosophie. Fondée par Henry-Louis de La Grange (1924-2017) et Maurice Fleuret (1932-1990), la MMM accueille depuis 1986 un large public mélomane comme professionnel désireux de consulter des sources et une documentation dont la richesse n’égale que la diversité.

Développer des lieux de conservation, de savoirs et de pratiques

On l’aura compris, la vocation désormais commune de la BmFL et de la MMM est de donner à voir, à lire et à entendre pour mieux comprendre et ressentir la musique. Lieux de conservation mais aussi d’échanges de savoirs et de pratiques, les bibliothèques musicales ainsi conçues ont une place à tenir dans le paysage de la recherche et de la création. Elle joue un rôle d’information, de documentation mais aussi d’inspiration du spectacle vivant.

À ce titre, nous remercions la rédaction de Profession Spectacle d’ouvrir un espace dédié à l’actualité et à la mise en valeur des bibliothèques et fonds d’archives musicales. Au fil de nos prochains billets, nous nous proposons de porter un éclairage particulier sur des projets artistiques basés sur des sources musicales conservées dans nos collections ou ailleurs, sur l’histoire des collections ou des documents originaux.

Gageons que ces « feuillets d’album » virtuels attiseront la curiosité des lecteurs et les encourageront à fréquenter les bibliothèques qui, même au temps du « tout-numérique » demeurent des lieux indispensables à la connaissance et à la création.

Thomas VERNET

Fondation Royaumont – responsable de la BmFL / MMM
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1 Catalogue de la collection musicale François-Lang, établi par D. Herlin, préf. F. Lesure, Paris, Klincksieck, 1993.

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