Cinéma – Créateurs et producteurs soutiennent la modernisation de la chronologie des médias
Dans une tribune collective, la Société civile des auteurs réalisateurs producteurs (ARP), la Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD), la Société des réalisateurs de films (SFR), le Syndicat des producteurs indépendants (SPI) et l’Union des producteurs de cinéma (UPC) ont fait part de leurs réactions concernant les propositions du ministère de la culture sur la chronologie des médias.
Les organisations professionnelles du cinéma de meurs espérances, craintes et attentes après les propositions émises par les médiateurs, mandatés par Françoise Nyssen sur la question.
Nous reproduisons ci-dessous leur tribune intégrale.
Nous, créateurs et producteurs de cinéma, avons pris connaissance des propositions des Médiateurs, mandatés en octobre dernier par la ministre de la culture pour parvenir à un accord sur la chronologie des médias.
Nous avons tous participé à cette réflexion collective de façon constructive et en ayant pour objectif une amélioration du financement de la création, avec une réelle exposition du cinéma dans toute sa diversité, un accès aux œuvres sur tout le territoire, pour l’ensemble des spectateurs et sans interruption, et une meilleure intégration des nouveaux usages ainsi que des nouveaux acteurs.
Dans sa proposition « de compromis », les Médiateurs proposent que toutes les fenêtres soient raccourcies, poursuivant un objectif légitime de contraction globale de la chronologie des médias. Ceci est vrai pour l’ensemble des fenêtres, sauf pour la fenêtre salle, qui resterait à 4 mois, alors que 69% des spectateurs estiment que les films restent visibles moins de 3 semaines dans les salles de cinéma et 67% que le délai pertinent entre la sortie en salles et la sortie en VOD doit être de 3 mois maximum*.
Nous sommes favorables à un délai de 3 mois pour tous les films, afin que cette réforme soit la plus lisible possible. En l’état, le 4e mois serait soumis à un élargissement du mécanisme de dérogation actuellement existant et jamais utilisé à ce jour. Les modalités de cette dérogation restent floues et manqueront de clarté pour les usagers. Par ailleurs, le principe d’expérimentations durant cette fenêtre salle est retenu par le médiateur mais il importe que celles-ci soient précisées et garanties.
Une réelle régulation des salles doit être mise en place. Il s’agit de garantir un avenir à la création indépendante, qui se retrouve aujourd’hui étranglée par un décrochage des plus en plus rapide des films, et par des prix prohibitifs imposés par les circuits pour la diffusion de leurs bandes annonces et affiches. Comme tous les acteurs de la diffusion des films, les salles de cinéma doivent avoir des obligations effectives et la valeur créée grâce aux œuvres doit être mieux répartie. Il est notamment inacceptable que les créateurs ne bénéficient aucunement des revenus annexes perçus en salles (publicité et autres revenus perçus grâce aux films projetés).
Par ailleurs, l’avancement des fenêtres de télévision payante et de service de VADA, pour les acteurs les plus vertueux, qui s’engagent à respecter les obligations issues des accords interprofessionnels va en soi dans le sens d’une modernisation. Il conviendra d’aller vers un alignement des modalités de régulation entre services non linéaires et service linéaires, afin de répondre à l’évolution des usages et à la grande mutation numérique mondiale.
Dans cet esprit, l’accord professionnel qui est prévu comme condition de cet avancement doit par ailleurs reposer, pour la 1ere fenêtre payante comme pour la 2nde, sur des règles préalablement établies et formalisées dans l’accord, en termes notamment de modalités d’investissement en préachats, de diversité des œuvres, de pérennité et de respect du droit d’auteur. Nous souhaitons également que la durée des fenêtres reste identique quelle que soit la durée de la fenêtre salle.
De la même manière, et dans la mesure où les engagements seront fixés en minimum garanti par abonné, il faudra clarifier la notion d’« abonné » comme toute personne qui a « accès à l’œuvre », quelle que soit l’offre par laquelle l’œuvre a été mise à disposition du public.
A ce stade, le projet de texte n’a pas pleinement retenu le principe de neutralité technologique aux termes duquel il n’y a plus de distinction entre télévision payante linéaire et plateforme de vidéo à la demande par abonnement. Un alignement des modalités de régulation entre services non linéaires et services linéaires reste un objectif fondamental.
Enfin, la proposition des Médiateurs d’énoncer dans l’accord la nécessité d’un plan déterminé de la part des pouvoirs publics pour intensifier la lutte contre le piratage des films fait l’unanimité et demeure une attente forte des créateurs et des producteurs.
Les résistances et l’inertie de certains acteurs ne doivent pas nous empêcher d’aller de l’avant. Si nous soutiendrons les efforts des Médiateurs pour parvenir à un accord, nous continuerons à défendre une réforme de la chronologie des médias à la hauteur des enjeux liés au financement de la création et à la diffusion des œuvres.
ARP, SACD, SFR, SPI et UPC
* Source : sondage Opinionway pour l’UPC