La rémunération des artistes étrangers travaillant en France

La rémunération des artistes étrangers travaillant en France
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Dans le monde de la culture et du spectacle français, il est tout à fait usuel de travailler avec des artistes venus d’autres pays du monde. Au-delà du plaisir que cela représente, il y a deux ou trois questions que l’on doit se poser pour leurs conditions d’emploi et de rémunération.

L’artiste étranger doit-il demander une autorisation de travail ? S’il travaille usuellement dans un pays membre de l’Union européenne (UE), en Islande, Norvège ou au Liechtenstein, c’est-à-dire un pays de l’Espace économique européen (EEE) ou en Suisse, il n’y a pas besoin de solliciter une autorisation de travail. Attention au cas particulier du Royaume-Uni depuis le 1er janvier 2021.

À défaut, il faut demander une autorisation de travail au ministère de l’Intérieur. Sauf, et ça nous intéresse, pour un « artiste du spectacle » dans le domaine de la « production et la diffusion cinématographiques, audiovisuelles, du spectacle et de l’édition phonographique » (D.5221-2-1 du Code du travail). Dans ce cas, pas besoin d’autorisation de travail. À noter qu’il en est de même pour le « personnel technique attaché directement à la production ou à la réalisation », et en matière de « manifestations culturelles [ou] artistiques », ce qui se recoupe quand même un peu avec les artistes du spectacle, ou en matière de mannequinat.

Doit-on salarier notre artiste étranger ? Par principe, l’artiste travaille dans le cadre d’un contrat de travail salarié (L.7121-3 du Code du travail). Mais il y a une exception pour les artistes qui sont prestataires de services dans leur pays s’ils viennent de l’UE ou de l’EEE et s’ils exercent en France de manière temporaire et indépendante (L.7121-5 du Code du travail). Dans ce cadre, on peut conclure un contrat de prestation de service ; l’artiste sollicite de l’organisme de Sécurité sociale de son pays un formulaire A1 ou Certificat concernant la législation de sécurité sociale applicable au titulaire qui confirme que les cotisations ne sont pas dues en France.

Et si on dit salariat, on dit aussi cotisations sociales. La question qui se pose est alors de savoir si l’artiste est ou non en situation de détachement. À qui l’employeur doit-il payer les cotisations sociales ? Est-ce qu’elles sont dues en France, ce qui signifie que l’artiste n’est pas en situation de détachement ? Ou est-ce qu’elles sont dues dans le pays d’assurance sociale d’origine de l’artiste, qui est alors en situation de détachement ?

Pour être détaché, tant au regard du droit du travail (L.1261-3 du Code du travail) qu’au regard du droit de la sécurité sociale (L.761-1 du Code de la sécurité sociale), il faut que l’artiste soit le salarié d’un employeur étranger qui lui demande de venir exécuter sa prestation en France. Mais pas un employeur de n’importe quel pays ! Là encore, ce doit être un pays membre de l’UE, de l’EEE ou la Suisse, mais aussi d’un des pays qui ont signé une convention de sécurité sociale avec la France et ils sont nombreux :

Algérie
Andorre
Argentine
Bénin
Bosnie-Herzégovine
Brésil
Cameroun
Canada
Cap-Vert
Chili
Congo
Corée du Sud
Côte d’Ivoire
États-Unis d’Amérique
Gabon
Guernesey
Inde
Israël
Japon
Jersey
Kosovo
Macédoine du Nord
Madagascar
Mali
Maroc
Mauritanie
Monaco
Monténégro
Niger
Nouvelle Calédonie
Philippines
Polynésie française
Québec
Saint-Marin
Saint-Pierre-et-Miquelon
Sénégal
Serbie
Togo
Tunisie
Turquie
Uruguay

L’artiste remet à l’entreprise française dans laquelle il vient travailler un formulaire A1 certifiant qu’il est « travailleur salarié détaché ». Ce document sera à transmettre à l’URSSAF en cas de contrôle pour prouver que les cotisations ne sont pas dues en France. Attention : les cotisations de congé spectacles sont dues en France !

À l’inverse, si l’artiste n’est pas en situation de détachement, notamment parce qu’il est originaire d’un autre pays que ceux autorisés à détacher leurs salariés en France, alors les cotisations sociales sont dues en France, qu’il s’agisse de sécurité sociale, de retraite complémentaire, de congés spectacle, etc.

Enfin, si l’artiste est résident fiscal en France, il sera soumis au prélèvement à la source. À défaut, on appliquera une retenue à la source, sauf cas d’une convention bilatérale spécifiant un paiement dans le pays d’origine.

Julien MONNIER

Avocat au Barreau de Nantes

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