“Sans accompagnement, l’année blanche deviendra une année noire”

“Sans accompagnement, l’année blanche deviendra une année noire”
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La Fédération des festivals d’humour (FFH) dresse un premier bilan de la pandémie, énonçant les risques graves pesant sur la profession, injustement réduite à un « art mineur », et appelant le gouvernement à poser des actes forts.

Profession Spectacle reproduise en intégralité le communiqué paru lundi 18 mai 2020.

Communiqué

La FFH réunit 50 festivals d’humour sur la France, et est associée à des festivals francophones en Suisse, Belgique et Québec. En France elle représente plus de 350 spectacles accueillis, 126 000 spectateurs et une recette billetterie de plus de 1 000 000 € par saison. Ses adhérents emploient 50 personnes en CDI et CDD et plus de 100 intermittents pour 500 jours de travail.

Ses actions s’organisent autour d’un double engagement : professionnel bien sûr (auprès des permanents, artistes, auteurs, techniciens, régisseurs, chauffeurs, personnels d’accueil…), mais aussi citoyen avec un nombre considérable de bénévoles, et d’actions permanentes de cohésion sociale en milieu rural et dans les quartiers urbains.

Très impactée par le coronavirus et la crise sanitaire, et ayant dû faire face à des dizaines d’annulations, la FFH et les festivals qu’elle représente alertent l’État et le secteur culturel sur les menaces qui pèsent sur ses adhérents et sur la pérennité de ces rassemblements culturels.

Les festivals d’humour de la FFH, de toutes tailles, sont implantés en milieu urbain et rural, et participe grandement à l’irrigation culturelle de territoires souvent oubliés par la culture.

La FFH prend acte de l’année « blanche » proposée aux intermittents qui rendent
nos Festivals possibles par leurs compétences et leur engagement. Cependant les mesures barrières préconisées et projetées pour pouvoir accueillir de nouveau des spectacles, ne sont pas économiquement viables pour notre secteur. Nous demandons un soutien pour l’année 2021, année de transition. Car sans accompagnement, l’année blanche deviendra une année noire.

Mais comme pour l’ensemble du spectacle vivant, l’organisation de nos festivals repose sur tout un maillage d’intervenants et professionnels, également fragilisés, qui ne relève pas forcément de l’intermittence : le réseau des salles de spectacles bien sûr, mais aussi prestataires techniques, attachés de presse, catering, sécurité́ et prévention, billetterie, promotion, affichage, etc.

Et si le tissu culturel français est en friche, ce qui sera très probablement le cas en sortie de crise, c’est tout un secteur économique et de cohésion sociale qui disparaitra.

La FFH demande un plan national de sauvetage des structures d’organisation de festivals en prenant en compte les frais engagés au moment de l’annulation (frais de communication, de préparation, avances déjà réglées aux productions…), et les recettes perdues.

L’humour, souvent déconsidéré par les institutions culturelles, est pourtant le secteur d’art vivant qui produit le plus de représentations (17 000 par an) sur tout le territoire national, et participe grandement à l’émergence de jeunes comédien(ne)s et de jeunes auteurs et autrices.

Un signe inquiétant a été envoyé par le gouvernement en supprimant le crédit d’impôts pour les spectacles de ce répertoire, avortant ainsi de nombreux projets de créations.

Fédérés autour d’une discipline que l’on aurait tort de réduire à sa légèreté apparente, les festivals de la FFH revendiquent le fait que l’humour n’est pas un art mineur se limitant au simple divertissement. Ne pas reconnaître ce genre culturel, c’est continuer à opposer la culture savante à la culture populaire, créer des distinctions et des antagonismes stériles.

Et nous affirmons que le qualitatif « populaire » n’est pas un gros mot, ni forcément synonyme d’indolence culturelle.

Déprécier l’humour, c’est mépriser Molière, Raymond Devos, Philippe Avron, François Morel, François Rollin, Rufus, Blanche Gardin et autres artistes majeurs qui font partie intégrante de notre ADN.

Cela reviendrait aussi à ne pas mesurer que les festivals d’humour « réinventent » depuis longtemps déjà la culture dans nos régions en s’adressant aux « publics empêchés », aux scolaires, et à tous ceux qui ne fréquentent pas habituellement les salles de spectacles. L’humour constitue souvent, à ce titre, une porte d’entrée accessible et conviviale, vers le théâtre et le spectacle vivant…

Pour les festivals financés par les casinos dans le cadre des MAQ (manifestations artistiques de qualité) nous demandons au gouvernement de se prononcer au plus vite sur les crédits d’impôts accordés aux casinos quand les manifestations ont été annulées. Si ce crédit d’impôts n’était pas accordé, et que les engagements financiers ne sont pas respectés, plusieurs dizaines de structures seraient en cessation de paiement. Il y a urgence !

La crise économique qui s’annonce risque de priver les festivals d’une part importante du montant des partenariats privés notamment celle issue des petites entreprises locales, ce qui aura sans doute de graves conséquences sur l’équilibre financier de nos structures. Nous demandons au gouvernement de prendre toutes les mesures incitatives pour favoriser le soutien à la culture.

Pendant la période de confinement, les humoristes ont été en première ligne à la radio, sur internet et les réseaux sociaux. Restant très attachés à l’art vivant, ils ont néanmoins largement participé à la continuité culturelle et créative et ont maintenu le lien avec le public, contribuant à prendre un peu de distance avec l’angoisse induite par cette situation inédite.

Aujourd’hui notre secteur est profondément menacé. En septembre et sans perspective claire de reprise ni mesure forte d’aide et d’accompagnement, il risque d’être détruit. Il ne pourra plus alors jouer son rôle de rampe de lancement des jeunes artistes, ni apporter espoir et envie dans les territoires ruraux et les quartiers. Il ne pourra plus tenir son rôle d’employeur d’artistes, et techniciens ni garantir les retombées économiques pour nos villes et nos régions.

Il se produirait alors l’inverse de ce que le président de la République semble appeler de ses vœux.

Le Conseil d’Administration de la FFH

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