VIDÉO – Exposition : “Un éclat de soleil” tout droit venu des Îles Féroé

VIDÉO – Exposition : “Un éclat de soleil” tout droit venu des Îles Féroé
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CRITIQUE – La Maison du Danemark organise pour la première fois en France une exposition de peinture consacrée aux peintres féroïens ; elle se tient jusqu’au 13 mars 2022 et s’intitule : « Un éclat de soleil ». C’est notre instant critique de ce jour.

 

Pour cet instant critique, je vous emmène donc aujourd’hui au cœur des îles Féroé. Terre impitoyable et mythologique, les dix-huit îles Féroé oscillent entre le beau et le sublime. Quand la brume s’y abat, s’élèvent les légendes, se dressent des récits immémoriaux et flottants. On y parle de moines irlandais et d’un premier homme, Grímr Kamban, viking norvégien en quête d’un refuge…

Rattachées aujourd’hui au Danemark, dotées d’une langue propre, peuplée par un peu plus de 50 000 habitants, les îles Féroé n’ont initié une tradition picturale qu’assez récemment, au début du XXe siècle : Niels Kruse, Sámal Joensen-Mikines ou encore Ingálvur av Reyni (1920-2005), qui est le premier peintre exposé à Paris et probablement le plus célèbre artiste féroïen de la seconde partie du XXe siècle.

Ses paysages rappellent ceux de Cézanne, les formes s’inspirent du cubisme, l’épaisseur de certains traits convoquent Rouault, son intérieur printanier désigne Van Gogh… Autant dire qu’à assigner ainsi tant d’illustres noms, Ingálvur av Reyni est unique. Il n’y a rien de superflu dans sa peinture ; elle se donne à voir dans une nudité de couleurs et d’impressions apaisantes.

Zacharias Heinesen, né en 1936, se réclame lui aussi de Cézanne, creusant une filiation à travers le temps. La commissaire de l’exposition, Kinna Poulsen, dit de lui qu’il peint inlassablement la vue de sa fenêtre, la lumière exceptionnelle offrant de constantes variations que le peintre intériorise pleinement, jusqu’à caresser l’abstraction. Il peint la terre prise, comme nous, dans les tenailles d’un temps qui la bouscule continuellement.

À ces deux humanistes répondent deux artistes plus jeunes, deux femmes, Rannva Kunoy et Hansina Iversen. L’éclat de de soleil semble comme venir de l’intérieur de leur peinture, nous obligeant à voir, mais également à entendre leur art.

Rannva Kunoy vit aujourd’hui à Londres. La couleur est recouverte de traits, d’entrelacs, de balafres, d’arrêtes, d’entailles et de ciselures. L’artiste met des couleurs et des formes sur des réalités fuyantes ; grâce à un pigment spécial, les toiles changent de couleur, de sorte que Rannva Kunoy accouche de formes incertaines qui semblent habitées, selon l’endroit d’où l’on regarde, par d’éphémères éclats de foudre, d’horizon et d’écume.

Enfin, Hansina Iversen. Je la cite en dernier car, tandis que Rannva Kunoy se situe au cœur d’un combat pour la lumière, Hansina Iversen en célèbre la victoire définitive. Ses toiles sont comme la sagesse, la grâce ou la jarre de la veuve de Sarepta : la lumière se donne à nous sans s’épuiser jamais. Il y a comme une insolence de cette lumière, à l’heure des pandémies, des restrictions empilées de nos libertés, de la colère sociale et des inégalités en tous genres. Elle nous laisse échoués dans la misère ambiante du monde, tout en attisant dans le même temps notre irréfragable espérance.

Cette exposition à quatre voix nous permet ainsi d’entrer dans une peinture où bat le pouls d’un souffle collectif, celui d’un peuple à la fois relié au monde et pourtant détaché de tout, ou plutôt irréductiblement attaché à l’essentiel : l’océan, la roche, les falaises abruptes et les doux pâturages de troupeaux en errance, réunis en un bouquet de lumière.

L’une des grandes qualités de cette exposition, enfin, est qu’elle n’est pas surchargée. Il faut compter entre trois et six tableaux pour chaque artiste, au sein d’un espace lumineux et agréable, ce qui nous permet d’évoluer à notre rythme, sereinement, afin de recueillir ces éclats de soleil – ce qui n’est pas superflu en cette période hivernale.

L’exposition se tient jusqu’au 13 mars 2022 à la Maison du Danemark, à l’ombre de l’Arc de Triomphe, sur les Champs-Élysées. Elle est ouverte du mardi au dimanche, de 12h à 18h. L’entrée est libre, sur présentation du sinistre pass vaccinal.

Pierre GELIN-MONASTIER

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