VIDÉO. Patricia Coler : « La question fiscale, pour nous artistes, est politique ! »

VIDÉO. Patricia Coler : « La question fiscale, pour nous artistes, est politique ! »
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L’Union Fédérale d’Intervention des Structures Culturelles (UFISC) est un vaste réseau, pionnier du rapprochement de l’économie sociale et solidaire et des organisations artistiques. Créée en 1999, l’UFISC représente aujourd’hui plus de 2 000 structures développant des projets artistiques et culturels. Elle affirme un espace socio-économique spécifique, qui se caractérise par une « économie non lucrative de marché », relevant également du concept de « tiers secteur ».

Entretien avec la déléguée générale de l’UFISC, Patricia Coler.

Fiscalité et engagement politique (extraits)

« L’UFISC s’est construite sur une question à la fois technique et pragmatique, celle de la fiscalité que rencontre toute structure, qui développe une économie de projets, et en même temps très politique, parce qu’il n’y a plus politique que la question fiscale, la redistribution, la manière dont on se positionne dans le marché, dans la concurrence ou dans l’utilité sociale. »

« Sur cette base-là s’est développée une analyse un peu réflexive sur les pratiques des acteurs dans différents champs artistiques. C’est là qu’ils se sont aperçus des ressemblances, un cheminement sur lequel il était possible de se retrouver, des valeurs, des pratiques, de modes de faire qu’on pouvait à la fois construire ensemble et défendre ensemble. »

Un manifeste de la diversité (extraits)

« La construction de notre manifeste fut un temps acteurs-chercheurs de deux ans. Il y a eu plusieurs réunions, à la fois au sein de la vie associative du réseau et lors de rencontres publiques, qui ont fait qu’il y a eu un cheminement pour essayer, à travers ce manifeste, de dire quelle vision politique on a envie de porter – et c’est celle de la diversité et des droits culturels – et les pratiques réelles qu’on veut défendre, incluant les points de tension et de questionnement. Car il y a beaucoup de marge de progression dans les pratiques. »

« Il y avait cette compréhension qu’on pouvait participer et inventer au-delà des logiques institutionnelles. »

« Chaque personne participe de la culture. Il doit y avoir une reconnaissance de la légitimité de toutes les cultures. L’orientation à défendre par les pratiques et par la politique est celle de construire la personne dans ses libertés, dans ses responsabilités, et puis dans ses « capabilités », pour reprendre le mot d’Amartya Sen. »

Droits culturels : des principes fondateurs ? (extraits)

« Les droits culturels sont une vision politique. La Déclaration des droits de l’homme sont une vision politique ; ce n’est pas quelque chose qui se construit naturellement. À un moment donné, c’est de dire qu’on a cette volonté d’avancer vers une manière de penser la culture. »

« C’est une idéologie ou une utopie. C’est quelque chose qui nous conduit, ce n’est pas naturel. C’est une volonté de vivre ensemble, une volonté de partage, une volonté de considérer l’autre dans sa dignité culturelle. »

« Il nous faut trouver les espaces démocratiques qui nous permettent de gérer cette diversité et ce partage, et que cela se fasse dans l’apaisement. Or aujourd’hui, nous sommes plutôt dans des logiques descendantes, qui vont s’imposer aux personnes, et non pas justement dans un espace démocratique. »

« Penser simplement la politique comme une logique d’accès à la culture, en niant le fait que les personnes arrivent avec leur propre culture, c’est quand même un peu les délégitimer par rapport à ces droits fondamentaux, à leur dignité propre. »

Économie… sociale ou solidaire ? (extraits)

« La question de l’économie solidaire n’est pas vraiment une question économique. C’est plutôt une question démocratique. D’où le lien avec la défense des droits fondamentaux. Tout le projet de l’économie solidaire est de réinscrire l’économie dans le politique, donc de réinscrire la manière d’organiser les moyens de production, d’échange, etc., dans une vision politique qui assure, exige la garantie et l’exercice de ces droits fondamentaux. »

« Dans une société où le premier but d’une économie ou d’une entreprise est de réaliser – ce n’est pas moi qui le dis, mais le code civil, malheureusement – l’intérêt des actionnaires qui ont pris part à la société, ça ne rend pas forcément très facile cette logique de défense des droits fondamentaux. D’où le fait de défendre une économie solidaire, qui gère l’organisation du travail, les entités économiques, un écosystème de territoires et d’échanges, en essayant d’inventer une nouvelle pratique, et surtout en faisant valoir cette logique d’une nouvelle économie politique. »

« L’économie est politique ; l’économie n’est pas technique. Il faut donc en pouvoir saisir l’idéologie, qui est sous-jacente aux formes d’économie. »

« Il est temps de repenser la manière dont on organise notre économie, pour qu’elle ressemble à cette société qu’on veut porter. »

Propos recueillis par Pierre GELIN-MONASTIER



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