État des lieux des politiques culturelles en Bourgogne-Franche-Comté

État des lieux des politiques culturelles en Bourgogne-Franche-Comté
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À la suite de la réforme territoriale de 2015, qui a vu les régions Bourgogne et Franche-Comté fusionner, les acteurs culturels ont connu une phase de remise en question de leurs pratiques. Le défi est de taille puisqu’il s’agit d’établir un diagnostic des territoires pour construire ensemble et « aller à la découverte du voisin », selon l’expression de la présidente PS de la nouvelle région, Marie-Guite Dufay.

Comment créer des synergies entre les institutions, les politiques et les associations, au sein de ce vaste réseau de villes moyennes, marqué par la ruralité ? État des lieux des politiques culturelles en Bourgogne-Franche-Comté

La fusion des régions vue d’en haut

« Cette union de nos deux régions a aiguisé notre curiosité collective et rien n’est plus fertile pour l’appétit de culture », constate Marie-Guite Dufay. En effet, depuis 2015, villes, agglomérations, départements et institutions culturelles sont amenés à réinterroger leurs pratiques.

« Depuis l’élection du nouveau conseil régional en décembre 2015, nous avons noué des relations de partenariats et de co-construction des politiques culturelles entre l’État et la région, souligne également Bernard Falga, directeur de la Drac Bourgogne-Franche-Comté. Cela a débouché sur la signature d’une convention cadre entre l’État et la région pour la conduite de ces politiques ». Et Bernard Falga d’insister sur le fait que cette initiative est « unique dans toute la France. Certaines choses importantes y sont écrites ! ».

Signé en mars 2017, « cet engagement conjoint de l’État et de la région vis-à-vis des acteurs et des institutions culturelles est une façon de signifier notre travail commun sur l’ensemble des dossiers – théâtre, musique, musiques actuelles, art contemporain, patrimoine… – et de donner plus de visibilité aux acteurs », explique la présidente de la région. La nouveauté, c’est que pour chaque secteur culturel et patrimonial, l’État et la région doivent se concerter et prendre des décisions conjointes : « Cela officialise et rend publique notre détermination politique. Alors que beaucoup de collectivités ont tendance à se désengager en matière culturelle, nous sommes très vigilants et particulièrement actifs. »

Marie-Guite Dufay (crédits : Y. Petit)

Deux réseaux solidaires : les musiques actuelles et les arts de la rue

« Les musiques actuelles sont très valorisées, attirant beaucoup les jeunes, remarque Bernard Falga. En effet, on compte une scène labellisée par département. On peut s’en féliciter, car ce n’est pas le cas dans toutes les régions ». La Fédération régionale des musiques actuelles (Féma) organise par exemple le festival Génériq. « Emmanuel Comby, directeur de la Rodia à Besançon, est un peu la cheville ouvrière de ce réseau », qui réunit également les directeurs du Silex à Auxerre, de la Cave à musique à Mâcon, de la Poudrière à Belfort et du Moloco à Montbeliard.

D’autres domaines artistiques ont créé leur tissu solidaire, tels les arts de la rue. « Je pense que c’est une spécificité de la région, car vous avez les Zaccros d’ma rue à Nevers et le Théâtre de l’Unité, fondé par Jacques Livchine, à l’extrémité est de la région, vers Audincourt. Ils font un travail extraordinaire ! Et puis vous avez, au milieu, Chalon-sur-Saône et son Centre national des arts de la rue. » Sans oublier le Jura, avec Patrice Jouffroy, directeur du Théâtre Group’. Tous ces acteurs se sont donc fédérés dans la nouvelle organisation régionale.

« On ne vient pas naturellement à la culture »

Si Marie-Guite Dufay réaffirme également cet accent donné aux musiques actuelles, le spectre de l’action politique est élargi au patrimoine, ainsi qu’à l’éducation artistique. « On ne vient pas naturellement à la culture, affirme-t-elle, selon une définition de la culture qui ne part pas des personnes, mais des pratiques artistiques. Il faut y être éduqué, si possible dès le plus jeune âge ». Cette priorité donnée au jeune public est partagée par les élus de la ville de Dijon.

En effet l’une des priorités culturelles du maire PS de Dijon, François Rebsamen, est le jeune public. « Il y a trois ans, nous avons inauguré la Minoterie, une scène conventionnée « Art, enfance et jeunesse » dirigée par Christian Duchange, explique Christine Martin, adjointe à la culture de la mairie de Dijon. C’est un lieu de travail pour les artistes, permettant la diffusion de spectacles et l’accompagnement. »

Autre signe fort de la région, le lancement d’Idylle, du 14 octobre au 18 novembre ; ce nouvel événement anime la Haute-Saône et la Nièvre avec des spectacles gratuits. « Cette création a pour particularité d’être construite en lien direct avec les acteurs du territoire – acteurs culturels et socioculturels, associations, habitants, écoles, etc. Je tiens vraiment à ce que la culture soit partagée avec le plus grand nombre et partout ! », s’enthousiasme la présidente de la région. Une position volontariste facilitée par une augmentation du budget « culture » de 12 % entre 2016 et 2017.

Un point sensible demeure néanmoins, dans la non augmentation des subventions du Fonds régional d’art contemporain (FRAC) de Bourgogne. Une polémique a en effet pointé un favoritisme de la part de Marie-Guite Dufay pour le FRAC de Franche-Comté.


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Quels sont les types de projets artistiques valorisés ?

Christine Martin (crédits : Morgane Macé / Profession Spectacle)

La DRAC Bourgogne-Franche-Comté soutient plus favorablement les collectifs d’artistes qui portent un projet national, voire international, dans des lieux dits en milieu rural.

« Un exemple que je trouve particulièrement emblématique est le lieu de fabrique du château de Monthelon dans l’Yonne, note Bernard Falga. Sa très jolie histoire remonte à une vingtaine d’années, quand des artistes suisses allemands de Zurich, venant du monde du cirque, se sont installés dans ce petit coin de l’Avallonnais ». Après avoir restauré le château, ils ont créé des studios de répétition pour danseurs et musiciens, permettant aujourd’hui la pratique de nouvelles formes de cirques. « On est plus dans le cirque Pinder, je parle du nouveau cirque comme le pratique la célèbre compagnie Plumes. C’est une forme artistique que l’on a vu émerger à la fin des années 70, avec des contorsionnistes et des acrobates qui sont pris dans un récit poétique et racontent une histoire. »

Bernard Falga évoque ce qui constitue, selon lui, le rôle du ministère : soutenir des projets qui ont une exigence et sont susceptibles d’avoir un rayonnement, garantissant l’attractivité du territoire. Une vision qui porte ainsi davantage sur l’image positive de ledit territoire que sur l’accroissement des droits culturels des personnes qui le constituent. Monthelon, qui donne lieu chaque année à un festival, est pour lui « un bel exemple de lieu où l’art d’aujourd’hui et de demain se fabrique ».

L’art contemporain à Dijon

François Rebsamen a quant à lui décidé de consacrer 23 % du budget de la ville aux arts et à la culture. L’art contemporain compte ainsi parmi les priorités des élus. Comme l’explique Christine Martin, différents lieux de création et d’exposition sont appelés à constituer un maillage : « Nous avons inauguré, au début de l’année 2017, la Halle 38, offrant la possibilité à une dizaine d’artistes d’avoir un atelier pour une durée d’un an renouvelable. Il y a de nouveaux lieux, comme la galerie Vortex, et chacun possède sa singularité. »

La ville développe par ailleurs l’implantation d’œuvres contemporaines dans l’espace public. « Lorsque la rue de la Liberté est devenue piétonne, nous avons implanté un Didier Marcel et un Gloria Friedmann. À chaque fois que l’opportunité se présente, on ne se prive pas de mettre en avant l’art contemporain, car c’est une façon de permettre à tous de se l’approprier. » Un projet de reconfiguration de la place Grangier a par ailleurs été entamé, avec le plasticien Bertrand Lavier.

Si les réseaux des musiques actuelles et des arts de la rue ont su tirer leur épingle du jeu de la réforme territoriale en se solidarisant, si la région et l’État expérimentent par ailleurs de nouveaux types de partenariats co-décisionnels, reste à savoir si ces engagements porteront à terme leurs fruits en faveur de tout le spectre des pratiques artistiques.

Morgane MACÉ

Correspondante Bourgogne-Franche-Comté

Investiture Marie-Guite Dufay (crédits : David Cesbron)

 



Photographie de Une – Conseil régional Bourgogne à Dijon (crédits : Erkethan / Wikipédia)



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