Interview. Dieter Kosslick, directeur du festival de Berlin

Interview. Dieter Kosslick, directeur du festival de Berlin
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Le 68e Festival international international Berlin (15-25 février 2018) propose à nouveau, depuis son ouverture il y a cinq jours, un vaste éventail de films venus des quatre coins du monde qui abordent les défis que représentent les grands changements que celui-ci traverse, mais le cinéma et l’industrie des médias eux-mêmes font également face à des transformations radicales. Alors que le festival arrive à mi-parcours, entretien avec son directeur, Dieter Kosslick.

Comment gérez-vous les critiques portant sur votre travail en tant que directeur du festival ?

Recevoir des critiques fait partie de mon travail. Ma mission est d’organiser un festival de catégorie A, ce qui implique sans doute qu’il faut prendre en compte différents intérêts, ou peut-être pas… Cela dit, dans ce débat, ce n’est clairement pas la qualité culturelle du festival qui est en question : très vite, c’est devenu une polémique sur moi en tant que directeur.

N’avez-vous pas perçu cela comme injuste, après 17 ans passés à consolider le cinéma allemand et à encourager les réalisateurs du cru dans le cadre de la Berlinale ?

Certains réalisateurs, comme Andreas Dresen et Dominik Graf, se sont dissociés de la lettre, et nombreux sont ceux qui sont venus à mon soutien. L’industrie du cinéma et des médias traverse des changements radicaux, ce qui rend tout le monde très nerveux.

À quelle aune mesurez-vous personnellement le succès du festival ?

Encore aujourd’hui, la Berlinale est un festival organisé pour le public. Cela fait 67 ans que ça dure, et le nombre de spectateurs ne cesse d’augmenter, autour d’un programme très sophistiqué sur le plan artistique comme en termes de contenu. Nous éveillons un désir de cinéma, et nous voyons bien que les fans du festival apprécient. C’est ça, la vraie réussite de la Berlinale.

 

Les films en compétition cette année parlent d’évasion, de changement d’identité et d’enlèvement, mais ils parlent aussi d’écrivains et d’enfermement de l’individu. Le nouveau travail de Steven Soderbergh, Unsane, est-il représentatif du programme dans son entier ?

Certains sujets, comme l’isolement et la radicalisation, se retrouvent dans le film de Soderbergh ainsi que dans U – July 22 d’Erik Poppe, mais je ne dirais pas qu’ils dominent le programme dans son entier. Les films de cette année parlent aussi de courage civil, comme c’est le cas de Mug de Malgorzata Szumowska ou Dovlatov d’Aleksey German Jr, qui raconte l’histoire d’un jeune écrivain dont le travail n’a pas été publié sous Brejnev, au temps de l’Union soviétique. Les gens ne veulent pas être à la merci de quelqu’un d’autre, et c’est ainsi qu’ils se dressent avec courage en faveur du changement.

Les histoires de réfugiés, comme dans Styx de Wolfgang Fischer ou Eldorado de Markus Imhoof, présentent des situations moins plaisantes, bien sûr, mais les récits sur les réfugiés viennent d’atteindre un degré nouveau : certes, il y est toujours question de fuite, mais ils évoquent avant tout les escales, les situations de transit dans lesquelles des gens se retrouvent coincés, et les raisons de la migration au niveau mondial.

Y a-t-il des thèmes dominants qui parcourent cette année toutes les sections du programme ?

Cette année, non, il n’y a pas de fil rouge qui parcoure tout le programme. On y retrouve des sujets comme la religion et les structures familiales atypiques, mais aussi le destin des artistes. Dans La prière de Cédric Kahn, un toxicomane se concentre sur des valeurs comme la croyance et l’amitié pour retrouver tant bien que mal une vie normale. La vie n’a jamais facile pour Astrid Lindgren, dont Pernille Fischer Christensen tracer le portrait dans Becoming Astrid. Et dans 3 jours à Quiberon, Emily Atef raconte une histoire tragique qu’a vécue la superstar Romy Schneider. Là, on voit comment une grande star se transforme en quelqu’un de vulnérable.

La réussite d’un festival se mesure-t-elle à présent à la proportion de talents féminins qu’il inclut ?

Quatre réalisatrices en compétition, ça ne paraît pas beaucoup, mais si on prend en compte les scénaristes et productrices, selon les calculs de ProQuote, la proportion des talents créatifs féminins atteint presque 50 %, donc je crois qu’à ce niveau-là, nous ne sommes pas mal.

Que se passe-t-il après la Berlinale ?

L’été prochain, nous allons nous déplacer, avec toute l’équipe, dans le gratte-ciel de verre de Potsdamer Platz. Le bail de nos bureaux et salles à Potsdamer Platz va se prolonger jusqu’en 2022. Je serai sur le tapis rouge pour la dernière fois en 2019. Cet été, la ministre de la culture et des médias, Monika Grütters, va annoncer qui s’y tiendra après moi.

Propos recueillis par Birgit HEIDSIEK

Source partenaire : Cineuropa


 

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