« Off Kilter » de Ramesh Meyyappan : l’étrange ballet d’un personnage insaisissable

« Off Kilter » de Ramesh Meyyappan : l’étrange ballet d’un personnage insaisissable
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Quand il rentre chez lui, Joe Kilter met sa robe de chambre et s’ennuie. Alors, il joue avec ses doigts et puis s’endort à sa table. Il sera bientôt réveillé par une armada de réveils disposés dans ses poches et partout dans l’appartement.

Proposé dans le cadre du festival Imago (Art et Handicap), Off Kilter de Ramesh Meyyappan dénonce par l’absurde l’asservissement au travail, la routine du quotidien. Grace à une précision des mouvements et un visage formidablement expressif, il compose avec adresse un univers proche de Jacques Tati, teinté de mystère, qui rend ce personnage hautement énigmatique et inquiétant.

Qui est-il ? Un maniaque ? Un inadapté de la société ou encore un homme seul qui tente de tromper l’ennui en s’inventant un monde où toutes les portes s’ouvrent ? Sans un mot, avec une bande son hypnotique et lancinante qui revient inlassablement, notre personnage transforme chaque simple geste en épopée grandiose. Joe se débat avec des objets récalcitrants jusqu’à être totalement à leur merci. Des crayons à papier disparaissent ou se tordent, l’étagère se penche : le bois se révolte. C’est à la fois très drôle et légèrement effrayant.

Mime, clown, danseur, magicien, acteur dramatique : Ramesh Meyyappan, originaire de Singapour et sourd lui-même, comme la plupart des artistes programmés au festival Imago qui sont atteints de handicap. Il fait rire une bonne partie du spectacle mais parvient à donner à son personnage des accents d’émotion en une fin magnifique où celui-ci se voit enfin comme il est, comprenant soudain toute l’absurdité de sa vie formatée.

En silence la plupart du temps ou soutenu par la composition sonore angoissante de Joel Nah, le comédien (mis en scène avec précision par Andy Arnold), dans une gestuelle millimétrée qu’il contrôle à la perfection, réalise un spectacle visuel ahurissant d’humanité et captivant de bout en bout, qui traite du bien-être mental.

Un spectacle qui parle à tous

Nous avons tous un peu de ce Joe Kilter, ce qui nous le rend particulièrement proche, et suivons, interpellés et émus, son chemin vers l’acception de lui-même et l’affirmation de sa différence.

La représentation d’Off Kilter à l’IVT (International Visual Théâtre), mêlant le public entendant et non entendant, fut un moment de rare fraternité pour une aventure originale où chacun (petit ou grand) pouvait y trouver son bonheur à des niveaux divers ; les uns appréciant le mime-clown et magicien, les autres l’aliénation de l’homme par le quotidien. Une proposition pittoresque et réalisée dans un bel univers visuel très maîtrisé.

L’énergie du mime très particulière, si différente de ce qu’on a l’habitude de voir, peut au premier abord déconcerter. Pourtant, si on accepte de se laisser porter, nul doute qu’on ne parvienne à entrer dans le conte surréaliste si singulier de ce drôle de clown triste…

Nicolas ARNSTAM

 



Spectacle : Off Kilter
  • Création : 2017
  • Durée : 1h
  • Public : à partir de 12 ans
  • De et avec : Ramesh Meyyappan
  • Mise en scène : Andy Arnold
  • Dramaturgie : Douglas Maxwell
  • Composition musicale : Joel Nah
  • Création lumière : Andy Lim
  • Chorégraphie : Jessica Kennedy
  • Illusionnisme : Kevin McMahon
  • Site : Ramesh Meyyappan

Crédits photographiques : Niall Walker

En téléchargement


OÙ VOIR LE SPECTACLE ?

Spectacle vu à l’International Visual Théâtre Paris en octobre 2018.

  • Aucune date connue à ce jour.

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