Le Off d’Avignon lance un nouveau dispositif d’aide aux auteurs

Le Off d’Avignon lance un nouveau dispositif d’aide aux auteurs
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Le mercredi 10 juillet a été présenté, dans le village du Off, un nouveau dispositif d’aide aux auteurs contemporains, lié à Avignon festival & compagnies. En partenariat avec les Écrivains associés du théâtre (EAT), il sera concrètement lancé en septembre. Présentation.

Il y a trois ans, Avignon festival et compagnies (AF&C) lançait un fonds de soutien à la professionnalisation, destiné aux acteurs et compagnies. Ce dispositif est la première marche d’une série d’aides destinées aux artistes que l’association coordonnant le Off d’Avignon souhaite mettre progressivement en place.

Sont en effet en discussion, voire en cours de création, trois autres dispositifs : un soutien aux résidences, afin d’aider les théâtres à ouvrir leur lieu à l’année ; un soutien à l’émergence, qui permettrait à des compagnies récemment constituées de monter un spectacle ; un soutien aux auteurs, enfin, présenté ce mercredi 10 juillet au village professionnel du Off.

Engouement pour le contemporain

Ronan Rivière, membre du conseil d’administration d’AF&C, évoque un constat initial : « Les classiques ont de moins en moins la cote, alors que les textes contemporains connaissent un nouvel engouement. » Comment accompagner cette dynamique ? Avec Éric Verdin, notamment président du comité de lecture tout public aux Écrivains associés du théâtre (EAT), il réfléchit « à un dispositif idéal pour aider de nouvelles écritures ».

C’est donc tout naturellement qu’AF&C et les EAT travaillent ensemble. « Nous avons créé une sorte d’architecture complexe et intégrant de nombreuses dimensions, développe Ronan Rivière. L’idée générale est d’aider l’auteur à être joué à partir du point final qu’il pose sur son manuscrit, jusqu’à la trentième représentation. Une telle vision est complètement folle, mais c’est précisément ce qui suscite l’intérêt », non seulement des EAT, mais également de la SACD qui a affirmé avoir « un regard favorable sur le dispositif ». Celui-ci doit maintenant passer sous les fourches caudines des commissions idoines de la société des auteurs.

« C’est un dispositif dont on rêve, s’enthousiasme Dominique Paquet, secrétaire des EAT. Dès la création des EAT, c’est que qu’on voulait : un dispositif vertueux qui ne laisse pas l’auteur au milieu du chemin. »

Comment fonctionne cette initiative, baptisée poétiquement « Constellation » à l’origine, avant de devenir le très administratif et sérieux « dispositif de soutien à la création, à la production et à la diffusion de nouvelles écritures » ?

Étape 1 : la sélection du comité de lecture des EAT (octobre)

En 2006-2007, les EAT ont mis en place un premier comité de lecture bénévole. Depuis, est lancé chaque année, au mois d’octobre, un appel à textes, remis à deux comités de lecture, le premier en charge de pièces tout public, le second pour les textes destinés à la jeunesse (aujourd’hui présidé par Marie Bernanos).

C’est tout naturellement qu’AF&C a décidé de s’appuyer sur cette structure existante, « la plus proche de l’esprit d’Avignon » selon Ronan Rivière en ce que ce sont « des auteurs qui jugent des auteurs, dans le but de les aider ».

Plusieurs critères ont été définis : les envois se font anonymement, à raison d’un seul texte par auteur ; les textes doivent être inédits – ni édités, ni montés – au moment de l’appel ; les adaptations et les traductions sont refusées (point qui fut toutefois l’objet d’un nouveau flou étonnant sur la frontière entre créateur et adaptateur, au moment de la présentation au village du Off) ; enfin, la pièce doit être en langue française, que ce français soit hexagonal, africain, québécois, insulaire…

Vingt textes sont ainsi sélectionnés chaque année, dix par comité, faisant déjà l’objet de diffusions diverses : mise en maquette lors des Mardi midi, envoi aux maisons de théâtre, présentation le 1er juin, lors de la journée nationale dédiée aux auteurs jeunesse…

Étape 2 : la rencontre d’un texte avec un théâtre (novembre-décembre)

« Notre dispositif s’adosse aux textes repérés par les comités de lecture des EAT sur les deux années écoulées, précise Ronan Rivière. Les manuscrits seront ensuite mis en ligne. » Un point qui fait encore débat, pour trouver le bon modèle qui évitera tout piratage ou diffusion inappropriée, au risque d’entraîner une impossibilité d’édition.

« Les théâtres d’Avignon seront amenés à les télécharger, ainsi qu’une fiche de lecture, poursuit le membre du comité d’administration d’AF&C. S’ils ont un coup de cœur, ils vont devoir formuler une proposition et se positionner sur le texte, en précisant notamment les conditions financières et techniques. » Plusieurs critères ont de nouveau été définis, comme un plafond de location de la salle ou encore l’interdiction de tout droit de garde. Le théâtre devra évidemment s’engager à ce que l’auteur soit déclaré et payé à la SACD.

Trois membres d’AF&C et deux auteurs formeront un comité-pilote chargé de choisir le théâtre qui représentera le texte, en considérant la faisabilité du projet, les conditions techniques et financières, etc.

Étape 3 : l’ouverture aux metteurs en scènes, compagnies et productions (janvier)

Les duos texte-théâtre sont proposés aux compagnies et productions en janvier sur la plate-forme d’AF&C. Si elles veulent se saisir d’un texte, il suffit d’envoyer un dossier de production et un dossier artistique (note d’intention, croquis de mise en scène, etc.).

Le comité-pilote choisit une compagnie par texte, afin de finaliser le trio texte-théâtre-compagnie : la promulgation des sélections est faite en avril.

Étape 4 : lecture et désignation définitive des lauréats (juillet)

Les acteurs, le metteur en scène et l’auteur bénéficieront d’une enveloppe de trois cents euros chacun pour financer une lecture, voire une maquette de vingt minutes, lors du festival Off d’Avignon. Un jury, composé du comité-pilote et d’observateurs extérieurs, vérifiera alors si les projets sont viables. « Dès qu’une compagnie est confirmée par le comité-pilote, elle s’engage à respecter les critères du fonds de soutien à la professionnalisation et à intégrer l’auteur au processus de création, en l’invitant à cinq services de répétition, ainsi qu’au spectacle. » Elle s’engage évidemment à ne monter le texte qu’au sein du dispositif de soutien.

Étape 5 : création à Avignon (juillet de l’année suivante)

Dès lors qu’une compagnie a été définitivement désignée, elle bénéficie automatiquement d’une batterie d’aides, notamment du fonds de soutien à la professionnalisation (cinquante euros par représentation et par acteur sur scène). Elle pourra également s’appuyer sur une aide à la résidence dans un théâtre d’Avignon, voire dans la Chartreuse de Villeneuve-lès-Avignon, sur une aide à la production (en cours d’élaboration), ainsi que sur une mise en relation avec les réseaux de diffusion. « C’est ce qui me paraît le plus intéressant, indique Ronan Rivière, parce que cela assure aux compagnies un minimum de préventes. Le fait d’avoir quelques dates de tournée aide énormément. »

ADN de l’auteur

Le dispositif sera concrètement mis en place dès septembre prochain, mais suscite déjà l’intérêt de plusieurs théâtres, sans parler des contacts pris avec différentes maisons d’éditions. Ronan Rivière n’est pas pour autant idéaliste : « On va nécessairement essuyer les plâtres sur la première saison puisqu’on ignore le nombre de propositions qui seront faites. »

Mais il réaffirme aussitôt le bien-fondé et l’esprit du projet : « Ce dispositif est pensé à partir de l’ADN de l’auteur. Il voit non seulement son texte joué, mais il touche encore des droits patrimoniaux. »

Pierre GELIN-MONASTIER



 

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